CHAPITRE VII

Leia Organa Solo occupait le compartiment passager de la navette de classe Marketta, le Lune de Chandrila. Olmakh et Basbakhan, ses deux gardes du corps noghri, étaient assis derrière elle. Leia sentait leur calme, qui contrastait avec l’angoisse de la femme placée devant elle, Danni Quee.

Leia se força à respirer sereinement pour éliminer sa tension.

En partie, au moins…

Le voyage Coruscant/Bastion bénéficiant d’une sécurité maximale. Le vaisseau empruntait les caps les moins courants, multipliant les détours.

Une fois dans le système de Bastion, le destroyer Protecteur avait attendu à la frontière des Vestiges, boucliers baissés et armement désactivé.

Bastion avait réagi promptement, par l’envoi d’un destroyer impérial, l'Indomptable, pour s’enquérir des intentions de la Nouvelle République.

Leia indiqua qu’elle devait communiquer des informations au général Gilad Pellaeon.

Le vaisseau des Vestiges avait rompu la communication deux heures durant. Puis Leia avait eu l’autorisation d’entrer dans le système avec son équipe personnelle et deux pilotes, à bord d’une navette.

L’amiral Aril Numb, du Protecteur, déclara qu’obéir, c’était se livrer à l’ennemi… Leia en avait parfaitement conscience. Beaucoup d’habitants des Vestiges s’accrochaient à leur gloire passée. Depuis la mort de l’Empereur, une nouvelle génération avait grandi, blâmant la Rébellion pour tous ses maux.

Chef de la Rébellion puis présidente de la Nouvelle République pendant le conflit, Leia incarnait à ses yeux l’amertume de la défaite.

D’anciens Impériaux ont tenté de perturber la cérémonie de mariage de Luke et Mara. Il serait idiot de me croire en sécurité. Pourtant…

La seule façon de lutter contre les Yuuzhan Vong était d’informer les Vestiges et de les convaincre que leur sort et celui de la Nouvelle République étaient liés. Leia avait demandé à Danni de témoigner des déprédations commises par les Yuuzhan Vong. Les Impériaux la trouveraient aussi convaincante que le peuple d’Agamar.

Leia posa une main sur l’épaule de la jeune femme.

— Tout se passera bien, Danni.

— Merci, dit la jeune femme, couvrant la main de Leia de la sienne. Chaque fois que je me sens découragée, je repense au sénateur A’Kla et je me dis que ma contribution n’est pas si difficile !

— Je crains que vous ayez raison, soupira Leia.

Elle se souvint du départ d’Elegos pour sa mission en solo, sur Dubrillion. Ne pas sentir de peur en lui, malgré la mission qu’il entreprenait, l’avait étonnée.

Elle le lui avait dit.

Leia avait serré Elegos dans ses bras.

— Vous n’avez pas besoin d’y aller. Il y a d’autres moyens…

— Vraiment ? Les Yuuzhan Vong haïssent les machines. Nous ne pouvons pas leur envoyer de droïd, ils considéreraient ça comme une insulte. D’après Anakin, ils respectent la hardiesse, d’où ma mission. Si j’en reviens, nous éviterons peut-être de nouveaux bains de sang.

— Et si vous ne revenez pas ?

— Vous aurez appris quelque chose de plus sur les Yuuzhan Vong. J’ai conscience du danger, mais s’il existe une possibilité de faire la paix, je dois essayer. Pas plus que vous, je ne peux me dérober à mes responsabilités.

Leia revint au présent en voyant le Chimaera, sur l’écran de sa cabine, la station douanière de Bastion se découpant derrière. Depuis que Leia s’était retirée du gouvernement, elle avait eu peu de rapports avec les Vestiges. Elle ignorait comment Pellaeon réagirait à sa demande.

Les rapports qu’elle avait lus pendant le voyage ne l’éclairaient pas beaucoup. Le développement économique de la région était lent. Sur plusieurs planètes, les gens vivaient dans la misère. La disponibilité de marchandises moins chères en provenance de la Nouvelle République avait fait capoter plusieurs industries. On parlait de soulèvements liés aux importations.

Les Vestiges savaient qu’il se tramait du vilain, mais ils n’avaient pas de détails.

Et si ça les a rendus soupçonneux, ma mission est vouée à l’échec.

— Nous avons reçu l’autorisation de nous poser dans le hangar principal de la station douanière, dit le pilote. Temps d’arrivée estimé trois minutes.

Danni se tourna vers Leia.

— Allons-nous vraiment rencontrer le fameux amiral Pellaeon ?

— C’est possible. Et ce serait bon signe ! La diplomatie marche comme ça, Danni. Mon statut d’ancien chef d’Etat incitera peut-être Pellaeon à nous recevoir. Mais si une opposition assez forte à la Nouvelle République existe au sein des Vestiges, ça pourrait être un suicide politique pour lui… Dans ce cas, un subordonné se chargera des négociations préliminaires. Selon le rang du délégué, nous aurons une chance… ou pas.

— L’astrophysique me semble plus facile que la diplomatie ou la politique !

— Je n’en suis pas si sûre… La politique a toujours fait partie de ma vie. J’y suis accoutumée. Pourtant, je voudrais quitter la scène publique. J’ai hâte de reprendre ma « retraite » !

La navette se posa sur le pont d’atterrissage et l’écoutille s’ouvrit. Basbakhan passa le premier. Olmakh fit signe à Leia quand son collègue lui indiqua que tout allait bien.

Les Noghri, des créatures de petite taille à la peau grise, auraient pu passer pour des enfants sans leur expression féroce. D’une habileté au combat légendaire, ils étaient dévoués corps et âme à Leia.

Leia frissonna. Vingt ans plus tôt, elle n’aurait jamais imaginé qu’il existât une créature plus dangereuse qu’un Noghri. Mais un Yuuzhan Vong avait tué Bolphur à mains nues…

Leia descendit la rampe d’atterrissage, ravie de voir deux escadrons de commandos. Cela présageait bien du déroulement de sa mission.

Deux officiers et une civile attendaient derrière les commandos. La femme, à peine plus grande que Leia, avança.

— Bienvenue, consul. Je m’appelle Miat Temm. Voici le colonel Harak et le major Pressin.

Leia leur serra la main.

— Je vous présente Danni Quee, mon assistante.

— Si vous voulez bien nous suivre…, dit Miat, désignant le turbo-ascenseur.

Dans la cabine, Leia utilisa la Force pour sonder les trois Impériaux. Elle capta de l’insécurité mêlée à de l’arrogance chez les deux officiers. Ils ne comprenaient pas leur affectation.

Elle ne détecta presque rien chez Miat.

Elle me bloque ! comprit Leia.

Elle réprima un sourire à l’idée qu’une Impériale ait des pouvoirs liés à la Force. Les ennemis de Pellaeon le savaient-ils… ?

Les portes s’ouvrirent. Miat les conduisit dans une salle de réception où un mur de transpacier donnait sur le Chimaera.

C’était bon signe.

Vêtu de l’uniforme blanc de grand amiral impérial, Pellaeon était campé devant une table également blanche.

Sans garde et sans arme.

Il sourit à ses invitées et fit signe à Leia de s’asseoir près de lui.

— Vous revoir me fait plaisir, consul Organa Solo. Asseyez-vous, je vous prie, et dites-moi la raison de votre visite. Voulez-vous des rafraîchissements ?

— Pas pour le moment, merci.

Leia serra la main de l’amiral, puis présenta Danni Quee.

Elle s’assit, remarquant que Pellaeon s’installait le dos tourné à ses aides. Miat ne sembla pas affectée, mais les deux officiers n’apprécièrent pas.

Pellaeon veut qu’ils soient mal à l’aise. Pourquoi ?

Leia se pencha vers l’amiral.

— Je suis venue corriger un problème de communication entre nous. Des événements très importants se sont produits, qui pourraient déterminer l’avenir de la Nouvelle République et des Vestiges.

— Vous parlez de la chute de Dubrillion.

Leia dissimula sa surprise. Pas Danni.

— Comment le savez-vous ?

— Nous avons toujours gardé un œil sur Dubrillion, ainsi que sur d’autres planètes frontalières de notre espace. Vous ne serez pas étonnée d’apprendre que nous avons des agents sur Dubrillion, consul. Ils nous ont fait savoir que quelque chose n’allait pas. Puis nous avons cessé de recevoir des messages.

« J’ai aussi entendu parler de Danni Quee. Nous avions un agent sur Belkadan, à la base ExGal. Nous n’avons pas eu de rapport depuis – sans doute – la destruction des installations.

— Qui était-ce ? demanda Danni.

— Laissons les morts reposer en paix, lâcha Pellaeon.

— Vous savez en partie ce qui est arrivé, dit Leia. J’ai ici une carte de données qui vous indiquera les détails techniques, mais en bref, voici de quoi il s’agit : des humanoïdes venus d’une autre galaxie ont attaqué ou détruit une demi-douzaine de mondes de la Bordure. Les Yuuzhan Vong sont technophobes, impitoyables et utilisent des esclaves pour combattre. Nous n’avons pu établir aucun contact diplomatique avec eux. Danni a été leur prisonnière un certain temps.

— Vous venez nous demander notre aide contre les Yuuzhan Vong ?

— Oui. Plus que quiconque, vous savez à quel point il est difficile de combattre un ennemi susceptible de frapper n’importe où. De plus, la situation politique de la Nouvelle République est un peu instable, pour parler franchement. L’invasion des Yuuzhan Vong, si elle n’est pas arrêtée, unirait probablement les factions dissidentes – mais trop tard. Nous devons les stopper maintenant. Nous disposons d’une force qui servira à merveille d’enclume... Il nous manque le marteau.

— J’aurais cru que les Jedi joueraient ce rôle pour vous…, fit Pellaeon.

— Comme le fichier vous le montrera, les Yuuzhan Vong sont immunisés contre les pouvoirs liés à la Force. Les Jedi font le maximum, mais ils ne sont pas assez nombreux pour régler un problème de cette gravité.

Pellaeon regarda les deux militaires.

— Votre requête avait été prévue, consul. Ces hommes m’ont répété que toute proposition de coopération militaire avec la Nouvelle République serait un piège. Vous attireriez nos vaisseaux loin de chez nous afin de les détruire et de conquérir le peu qu’il reste de l’espace Impérial. Ils n’avaient pas prévu ce scénario précis, mais il m’est difficile de ne pas tenir compte de leurs avertissements. Pour eux, cette menace est un leurre.

Leia sourit froidement aux deux hommes.

— Vos enfants sont des Jedi, dit Harak.

— Comme je l’ai précisé, les Jedi ont peu d’avantages sur les Yuuzhan Vong.

Pellaeon leva une main.

— D’accord, consul. J’examinerai vos données. Sachez que nous avons toujours le sentiment d’être responsables des peuples de la Nouvelle République, même s’ils nous ont rejetés. Si nous le pouvons, nous vous aiderons.

— Je ne peux pas vous demander plus.